Quelques pièces du royaume d'Axoum
Voici une étonnante petite monnaie en bronze du royaume d'Axoum du VI° siècle qui fait preuve d'une étonnante modernité, outre son aspect artistique un peu "surréaliste" comme les monnaies gauloises... Cette pièce a été émise par le roi chrétien Wazéna ayant régné vers 525 - 550 après JC, et semble émettre les bases de principes proto-démocratiques de souveraineté du Peuple un peu comme les monnaies constitutionnelles de Louis XVI lors de la Révolution française.
Au droit, on voit le portrait du souverain, de profil, tenant un épi d'orge à la main, entouré de l'inscription, et au revers, une croix croisée diviseant les inscriptions en 4 x 2 caractères.
Les caractères éthiopiens sur la monnaie signifient ceci :
Droit : = Celui qui s'adapte - ou qui convient - au Peuple : cette inscription est très intéressante car elle semble poser le principe d'une espèce de souveraineté du Peuple puisque c'est le souverain qui doit convenir ou s'adapter au Peuple, et non l'inverse comme dans une monarchie de droit divin façon Louis XIV. Ce fait précoce de principe démocratique devrait être rapproché de la Charte du Mandé(n) ou "Manden Siguikan" sorte de "Magna Carta" de l'Empire du Mali : Il existe deux textes de la charte, provenant des travaux menés à partir des années 1970 par Wa Kamissoko et Youssouf Tata Cissé : le Serment des chasseurs, qui remonterait à 1222, et la Charte de Kouroukan Fouga, qui remonterait à 1236, et aurait été solennellement proclamée le jour de l'intronisation de Soundiata Keïta comme empereur du Mali. Pour ce qui est de la gouvernance éthiopienne du Royaume d'Axoum nous n'avons pas d'élément de l'époque malheureusement mais l'inscription sur la monnaie est un indice qu'il ne s'agissait pas d'une monarchie absolue et que si le Roi, non-élu, devait s'adapter au Peuple, c'est qu'il avait probablement en face de lui une assemblée de notables ou de représentants du Peuple avec laquelle il devait composer ?
Revers : = de Wazéna, de la part du Roi : les lettres 2, 3 et 4 sont le nom de WaZéNa (WZN) car à l'époque l'écriture guèze s'écrivait selon le principe des consonnes sans voyelles : comme les autres langues sémitiques, Phénicien, Hébreu, Araméen ou Arabe, le Guèze, langue éthiopienne ancienne, actuellement liturgique comme le Latin, n'avait pas encore rajouté les voyelles comme le fait l'actuelle écriture éthiopienne amharique : voici quelques photos prises à l'aéroport d'Addis-Abeba ci-dessous...
Voici le descriptif de la pièce d'après le livre de S.C. Munro-Hay 1984 "The Coinage of Aksum" extrait de l'ancien catalogue de 1922 de C.J. Brown.
Actuellement, l'Ethiopie est le SEUL pays africain à posséder sa propre police d'écriture utilisée dans tous les usages culturels, économiques, administratifs et autres, ici à l'aéroport d'Addis-Abeba (enseigne d'une banque), sur l'éditorial du magazine de la compagnie Ethiopian Airlines, et pour les instructions de sécurité à bord des avions !